“Premières montagnes”

DANS UNE CHRONIQUE précédente je mentionnais mon expérience montagne sans n’avoir rien écrit dessus. Ce sera chose faite après ce récit de mon séjour au Lake District (région des lacs) dans le nord de l’Angleterre.

La première montagne que j’ai gravie était une des plus basses et des plus faciles. Je me suis donc dit qu’arriver à son sommet serait un jeu d’enfant. J’y allais plus confiante que jamais, fière de ma tenue de randonnée. Quinze minutes après le début de l’ascension, j’ai quelque peu déchanté. Ca n’arrêtait pas de monter et je n’en pouvais plus… Et c’était une des plus faciles. Je n’ai donc rien dit à mon compagnon de montée mais n’en pensais pas moins, je n’avais qu’une envie que ça se finisse. Et ça n’en finissait pas. Et mon compagnon de me raconter que le maire de la ville avait gravi cette montagne pendant 365 jours d’affilée trouvant toujours de nouveaux chemins. Je me suis dit : mais quelle idée de fou… 

Le deuxième jour, une nouvelle montagne nous attend, un peu plus haute mais toujours “facile”. Je commence la montée et peut-être vingt minutes se passent et là j’explose : “Je n’en peux plus, j’en ai marre de monter, ça ne sert à rien, j’en ai assez!!!” (à vrai dire, je ne me rappelle plus mes vrais mots mais c’était une grosse explosion que je n’arrive pas vraiment à transcrire en langage correct). Mon compagnon essaie de me rassurer en me disant que c’est normal de ressentir cela, que l’on va prendre notre temps, que l’on n’est pas pressé et que tout va bien se passer.

Donc je continue et petit à petit je regarde autour de moi et m’aperçois que la vue est magnifique. Ce n’est pas si désagréable finalement et j’ai honte d’avoir explosé peu de temps avant. Cependant je pense que c’est l’expression de mon mécontentement qui a débloquée quelque chose en moi. J’ai libéré de mon esprit les difficultés que je ressentais et cela m’a permis d’être plus positive.

Deux jours après (il ne faut pas exagérer, un jour de repos était le bienvenu) nous avons gravi la quatrième montagne la plus haute du Lake District et j’ai adoré. Je n’ai pas eu de pensées négatives comme lors des randonnées précédentes. Pendant celle-ci, j’ai réussi à trouver mon rythme et à être presqu’un automate, je ne pensais plus à mes jambes et j’avais l’impression que j’aurais pu gravir n’importe quelle montagne. J’aurais été capable de réserver mon ascension de l’Himalaya…

Je me suis dit qu’en fin de compte ce n’était qu’un pas après un autre, donc rien de difficile et que ce n’était qu’une question de mental. J’ai ressenti la même chose en commençant à écrire : ce n’est qu’un mot suivi d’un autre et encore un autre ce qui fait une phrase puis une autre phrase et enfin un texte.

Gravir des montagnes me fait penser à la vie. Je ne suis sans doute pas très originale en écrivant cela et j’imagine sans mal beaucoup de livres de développement personnel prenant la montagne comme métaphore de la vie. Je n’en ai pas lu. Je n’ai pas envie de lire les conseils de vie de quelqu’un que je ne connais pas, je veux les expérimenter moi-même.

Revenons à la montagne et la vie. On naît, on grandit comme on monte la montagne, on vit des moments qu’on pense importants comme dans la montagnes on arrive à des pics qu’on pense être le sommet. Puis on voit au loin qu’il y a un autre pic (peut-être le sommet mais rien n’est moins sûr). Surtout ne pas se décourager. Dans la vie, un moment important succède à un autre puis des moments plats (plus ou moins longs) où il ne se passe pas grand chose. Seulement les petites choses du quotidien. On s’aperçoit souvent bien après qu’on a vécu de très bons moments pendant ces périodes insignifiantes. En montagne ce sont les chemins plats avec de jolies fleurs ou pierres ou moutons. Puis tout d’un coup il y a une petite descente pour mieux remonter un peu plus tard.

Je n’ose imaginer que le sommet représente la mort. Mais non, il y a toujours une autre montagne à gravir, une autre expérience à vivre, une autre photo à prendre, un autre écrit à rédiger, une autre personne à aimer.

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Béatrice Exploratrice